C'est Noël à Copenhague
La Conférence sur le climat de Copenhague s'est achevée hier. Deux semaines de tractations chaotiques. Aucune réduction chiffrée des gaz à effet de serre. Triomphe des égocentrisme nationaux, de l'obsession financière, de la lâcheté générale et de la courte vue. Or la contradiction règne. Tout le monde reconnait l'urgence de mesures à prendre contre le réchauffement planétaire, personne ne les prend.
Là-dessus voici Noël.
C'est une suite de fonctionnements vieille comme le monde. La littérature en est pleine. Les récits de psychanalystes aussi, je veux dire les récits narrant l'irresponsabilité des hommes et le besoin qu'ils éprouvent de faire la fête pour se distraire.
C'est une suite de fonctionnements puissamment fortifiés par notre époque, aussi. Par le système des liens brisés.
Des liens que nous ne tissons plus entre certaines choses et certaines autres.
Tant nous sommes heureux d'avaler une première tranche de bûche de Noël.
Des liens que nous ne tissons plus, par exemple, entre l'animalité sauvage et l'humanité dont nous sommes les représentants. Que nous ne tissons plus entre la mise à mal de nos identités individuelles au sein de l'univers professionnel et la violence misérablement compensatoire de nos comportements quotidiens.
Tant nous sommes heureux d'avaler une deuxième tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre notre crainte d'être dissous dans la masse urbaine et notre fièvre de consommateurs, dont nous espérons qu'elle atteste notre puissance. Des liens que nous ne tissons plus entre l'indifférenciation de jour et de la nuit dans nos mégapoles illuminées vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et ce désir de nous court-circuiter personnellement par l'overdose et le flash en tout genre et dans tous les domaines. Des liens que nous ne tissons plus entre notre asservissement à la performance quantifiable et notre production sous ce signe-là du Mal et de la prédation vis-à-vis d'autrui-pourvu qu'ils soient efficaces.
Tant nous sommes heureux d'avaler une troisième tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre notre manière d'admirer les avancées de la technique et celle dont cette technique nous enrôle en qualité d'agents toujours plus fidèles et toujours fiables. Des liens que nous ne tissons plus entre l'abrasion de notre mémoire collective et la manière dont nous réinstaurons les expériences de la durée, et de l'apparition puis de la disparition par le moyen des sidas qui nous accablent. Des liens que nous ne tissons plus entre le flux des images médiatiques déferlant chaque jour sous nos yeux et la façon dont nos nous préservons de leur impact en déployant sur elles un écran d'indifférence.
Tant nous sommes heureux d'avaler une avant-dernière tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre la manière dont une portion de la population mondiale organise la pauvreté de la seconde et celle dont elle jouit, à la vue du spectacle ainsi constitué, d'être confirmée dans sa position d'observatrice privilégiée. Des liens que nous ne tissons plus entre notre obsession du déplacement physique sur toutes les parties de la planète et l'apathie que nous manifestons dans l'ordre du proche où pourrait jouer la solidarité fraternelle. Des liens que nous ne tissons plus entre l'euphorie superficielle des temps modernes et l'horreur inapparente, de même qu'entre cette horreur et notre impuissance à nous réfléchir dans le miroir qu'elle constitue.
Tant nous sommes heureux d'avaler une dernière tranche de bûche.
Christophe Gallaz, journaliste et écrivain
Là-dessus voici Noël.
C'est une suite de fonctionnements vieille comme le monde. La littérature en est pleine. Les récits de psychanalystes aussi, je veux dire les récits narrant l'irresponsabilité des hommes et le besoin qu'ils éprouvent de faire la fête pour se distraire.
C'est une suite de fonctionnements puissamment fortifiés par notre époque, aussi. Par le système des liens brisés.
Des liens que nous ne tissons plus entre certaines choses et certaines autres.
Tant nous sommes heureux d'avaler une première tranche de bûche de Noël.
Des liens que nous ne tissons plus, par exemple, entre l'animalité sauvage et l'humanité dont nous sommes les représentants. Que nous ne tissons plus entre la mise à mal de nos identités individuelles au sein de l'univers professionnel et la violence misérablement compensatoire de nos comportements quotidiens.
Tant nous sommes heureux d'avaler une deuxième tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre notre crainte d'être dissous dans la masse urbaine et notre fièvre de consommateurs, dont nous espérons qu'elle atteste notre puissance. Des liens que nous ne tissons plus entre l'indifférenciation de jour et de la nuit dans nos mégapoles illuminées vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et ce désir de nous court-circuiter personnellement par l'overdose et le flash en tout genre et dans tous les domaines. Des liens que nous ne tissons plus entre notre asservissement à la performance quantifiable et notre production sous ce signe-là du Mal et de la prédation vis-à-vis d'autrui-pourvu qu'ils soient efficaces.
Tant nous sommes heureux d'avaler une troisième tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre notre manière d'admirer les avancées de la technique et celle dont cette technique nous enrôle en qualité d'agents toujours plus fidèles et toujours fiables. Des liens que nous ne tissons plus entre l'abrasion de notre mémoire collective et la manière dont nous réinstaurons les expériences de la durée, et de l'apparition puis de la disparition par le moyen des sidas qui nous accablent. Des liens que nous ne tissons plus entre le flux des images médiatiques déferlant chaque jour sous nos yeux et la façon dont nos nous préservons de leur impact en déployant sur elles un écran d'indifférence.
Tant nous sommes heureux d'avaler une avant-dernière tranche de bûche.
Des liens que nous ne tissons plus entre la manière dont une portion de la population mondiale organise la pauvreté de la seconde et celle dont elle jouit, à la vue du spectacle ainsi constitué, d'être confirmée dans sa position d'observatrice privilégiée. Des liens que nous ne tissons plus entre notre obsession du déplacement physique sur toutes les parties de la planète et l'apathie que nous manifestons dans l'ordre du proche où pourrait jouer la solidarité fraternelle. Des liens que nous ne tissons plus entre l'euphorie superficielle des temps modernes et l'horreur inapparente, de même qu'entre cette horreur et notre impuissance à nous réfléchir dans le miroir qu'elle constitue.
Tant nous sommes heureux d'avaler une dernière tranche de bûche.
Christophe Gallaz, journaliste et écrivain